Textes poétiques et d'actualité -nulle part ailleurs !

Articles tagués “manteau

A quoi bon décrire la neige ? – ( RC )

peinture Andrew Wyeth – ring road 1985

A quoi bon décrire la neige,
elle, qui ne laisse pas saisir,
ni par les doigts ni d’une autre façon ?
En me blottissant dedans,
ce serait un manteau de laine froide,
moulant les volumes de mon corps:
une empreinte que ne pourrai restituer
pour couler du bronze .
Mieux vaut l’approcher
par des chemins détournés,
la suggérer par les ombres,
et la manière qu’elle a
de cacher le dessus des objets,
adoucissant leurs formes .
S’il n’y avait pas de toit
il se pourrait qu’elle se dépose
en strates lentes,
et recouvre le bureau,
victorieuse à sa façon,
recouvrant les feuilles
qui y sont posées :
ce ne serait que revanche :
la page resterait blanche,
car… à quoi bon décrire la neige ?


Un sol, que rien n’hérisse – ( RC )

peinture:       Anselm Kiefer

 

Comme  sous  le couteau  du peintre,
Un gris dense plombe  un ciel,
Juste  strié  d’ailes noires,
Envol furtif au coeur du froid ;

Les signes dessinés des branches,
Patientent, immobiles,
Attendant un frémissement  de la terre,

Elle  qui se cache
Sous une  couverture  blanche,
Mate comme sont les bruits,
Vite absorbés par le silence.

Même les voix ne semblent plus oser,
Franchir l’espace immaculé.
De connivence avec le gris ,

Les nuances  sont  de lumière;
Et à part les chemins,
Qui rayent , de lignes fines
Champs et collines

Il semble  que tout soit uni,
Sous la laine  de l’hiver,
Toutes différences  abolies,

Des nuages  diffus traversent
Monts  et vallées
Et sans effort,  glissent,
Au-dessus du sol, que rien n’hérisse.

Les barbelés, délimitant les surfaces,
Ont été  gommés, en une nouvelle  naissance,
Les pentes sont redevenues vierges.

Les couleurs  se sont englouties,
Les pays ne connaissent plus de frontières …
De la terre, la neige  s’est faite  complice
La saison tisse doucement, le manteau lisse.

peinture: Charles Daubigny Neige près de Valmondois


Tout s’efface dans le blanc – ( RC )

nuage cone sur cone enneigé Jap cloud exped Helene.

 

 

 

 

Le blanc, est quelque part,       une  absence
Et si dans  ses possibles ,     je me lance…

Je sors de ma coquille, et, le pourrais-je
En  ne salissant pas         sa neige,

Le pied le plus discret la blesse,
Même celui , léger,        d’un déesse,

Une trace, une simple éraflure,
Dessine sa signature.

Elle fait vibrer la page blanche,
Quand l’écriture se penche  .

Les mots s’y impriment         et s’attachent,
Mettent du sens   – plutôt qu’ils ne gâchent.

On pourrait dire  que le blanc  n’est plus,
Qu’il disparaît dans de pauvres  résidus

Et qu’aussi,          il s’enfuit,
Il s’agace  aussi, de trop de bruit.

Mais         il suffit  d’un autre dimanche,
Pour que le blanc tienne  sa revanche  .

Il utilise les voies aériennes,
Pour  que la blancheur  revienne

Que  des flocons  s’amassent,
Partout où la plume s’enlace,

Les pensées recouvertes,        se cachent.
Au coeur même du blanc – plus de taches.

Tout est tu,             tout  s’efface,
Qu’y a-t-il, à la place ?

Quand  plus  rien n’émerge,
Du paysage  , retourné à l’état vierge.

Te souviens-tu  d’avant,
Avant que ne souffle le vent ?

Que la neige     ne se couche,
Et recouvre aussi ta bouche

–         Sur la vallée immense,
Règne maintenant le silence…

Ai-je  écrit en vain,
Espérant d’autres lendemains ?

Ceux qui , laissés-pour-compte,
Attendent, des glaces,  la fonte.

La neige  est un vaste manteau,
Qui  garde  pourtant au chaud,

Sous son blanc velours,
Toutes mes lettres  d’amour.


Grande couverture blanche – ( RC )

peinture: Claude Monet                        peinture:            Claude Monet

Arrivée en silence
Au milieu de la nuit,
La grande couverture blanche,
Absorbe tous les bruits.

Douce et moelleuse,
De tendresse,    comme s’ enlace,
Habille,                 en amoureuse,
Tout ce qui dépasse

Elle recouvre les noeuds les plus obscurs,
Les plis de la terre
Les carcasses de voitures,
Ainsi, les cimetières.

Coeur de la nuit phosphore,
Arbres verticaux d’immobilité,
Accrochés au bord,
Pointés dans l’obscurité,

Leur crinière de branches,
Bardée de neige,      qu’on distingue à peine
Sous la nocturne étendue blanche,
Flocons-papillons,  de multitude incertaine,

Se pressent                 dans leur chute lente,
Gommant toutes les limites,
Lointains        et attentes,
Déversés,          en silencieux rite…

Par centaines de milliers,
De cornes d’abondance ……
Modelé ,               le paysage familier,
Redessiné             en confidences.

Monts et montagnes dévalent,
Et , oublient leurs failles
Que la grande couverture avale,
En négligeant les détails.

Des haillons     et des fringues,
Des hêtres,     des pins et ormes,
Bientôt plus rien ne se distingue,
Sous             le nouvel uniforme.

Les pauvres      et les riches,
Recouverts du même manteau,
Les vignobles et les friches,
Voyagent incognito,

Lorsque         le blanc s’invite,
Et gomme les différences….
En métamorphose gratuite,

Quand l’hiver s’avance.


RC- février 2014


Mots en partance, aussi – ( RC )

Caponigro27

 

             

Un jour, allongé de tout mon poids,

Sur la roche rude, je n’aurai d’idées poétiques,

Que celles , rebondissant sur le gravier .

Elles correspondront à mon champ de vision,

Rétréci,

Et mon corps me sera un poids..

Incapable de me relever,

Les chiens me flaireront,

Ils ont la pensée vierge,

Et ignorent les livres ,

Sauf à les rapporter à leur maître,

Comment ils le font avec les pantoufles.

J’aurais pu te confier mes secrets,

Partager encore des images,

Elles, qui se cristallisent,

En confidences et écriture,

J’aurais été redressé sur un banc,

Encore mouillé de ses embruns marins.

Traînant encore mes vers,

Balbutiant ma langue morte,

Habitant encore, despotique,

Ma bouche, ma blessure ouverte,

— Pour enrober de détails inutiles,

Mon corps mourant.

Il n’y a plus de secret,

Et tu peux rire de moi,

La conversation est finie,

Le dernier chapitre s’est clos,

Je ne suis qu’un vagabond,

Allongé sur le rocher.

Sous un manteau gris et froissé,

A  sentir le froid me saisir….,

Les mots m’ont abandonné ;

Et j’entends tes pas crisser sur le gravier,

Puis diminuer, ….. – tu t’en es allé.

Je peux fermer les yeux.

RC – 18 novembre 2013


Michaël Dickman – où nous vivons.

illustration de livre  d'enfant

illustration de livre d’enfant

Michaël Dickman-

Où nous vivons

* J’avais l’habitude de vivre dans une mère maintenant je vis dans un tournesol

Aveuglé par l’argenterie

Aveuglé par le réfrigérateur

Je suis assis sur un trottoir dans le tournesol et  son averse jaune.

La lumière du monde perle sur une feuille verte parfaite

Elle griffonne son nom sur chaque chose vivante

il l’efface ensuite

et ce qui reste n’est plus d’un murmure d’une mère

Ici c’est le printemps

Maintes et maintes et maintes fois

J’avais l’habitude de vivre dans un nuage

maintenant je vis dans un corbeau

Il est minuscule et perclus de là,

mais je ne peux trouver mon chemin

pour la salle de bains dans le noir

quand je dois y aller

Toutes les fenêtres du corbeau sont restées ouvertes

et laissent entrer les nuages .

De retour Ils flottent ,passé mon lit et je n’ai rien à dire

Bonjour , ravi de vous rencontrer!

À partir d’un poteau de téléphone

les langues glissent en chantant bienvenue dans la maison

Bienvenue dans la maison , chantent-ils

-J’avais l’habitude de vivre

dans un arbre

maintenant je vis dans un roi

Il agite ses bras devant lui

et les migrations sans fin d’oiseaux

disparaissent dans son manteau

J’aime m’asseoir à l’intérieur de sa couronne ,

manger des sandwichs et regarder la télévision

Les collines se serrent dans la distance

quand il se mélange les pieds

les inondations quand il claque des doigts

Je m’incline à l’intérieur de son front

et l’après-midi s’étire.

Commandant encore plus de sandwiches

Et vendant des esclaves

et rendant les esclaves libres

et vendant des esclaves.

( Trad  RC ) ———

—– Where we live. I used to live in a mother now I live in a sunflower Blinded by the silverware Blinded by the refrigerator I sit on a sidewalk in the sunflower and its yellow downpour The light of  the world beads up on one perfect green leaf It scribbles its name on every living thing then erases it so what’s left is more of a whisper than a mother Here it’s spring Over and over and over again I used to live in a cloud now I live in a crow It’s tiny and crippled in there but I can find my way to the bathroom in the dark if   I need to All the windows in the crow are left open and let the clouds in Back in They float past my bed and have nothing to say Hello it’s nice to meet you! From a telephone pole tongues slide out singing welcome home Welcome home they sing I used to live in a tree now I live in a king He waves his arms in front of   him and endless migrations of   birds disappear into his coat I like to sit up inside his crown eating sandwiches and watching tv Hills shake in the distance when he shuffles his feet Floods when he snaps his fingers I bow inside his brow and the afternoon stretches out Orders more sandwiches And sells the slaves and sets the slaves free and sells the slave