Derrière le fard gris-vert des lichens – ( RC )
–
C’est brume,
Et les embruns parlent
au travers des sculptures .
quinze ans de modelage,
d’obstination sourde et muette,
avec le mouvement lancinant du ressac.
Des sentinelles se sont extraites
des rochers,
Veillent ( et il en surgirait d’autres ),
Leur regard de pierre
tient de celui des reptiles.
On ne sait si ce sont des gnomes,
ou des figures de saints,
qui tentent de sortir du granit
On se demande aussi
qu’est-ce qu’ils fixent ainsi,
dans l’horizon bouché …
peut-être les voiles du passé,
celles de Cancale,
et le retour des légendes ,
Fantaisies tourmentées:
rongées par le choc des vagues ,
la mémoire du sel.
Leurs corps fantomatiques s’assoupissent
sur un secret bien gardé,
scellé dans leur veille, les pieds dans l’eau .
Les coups de fouets obstinés
de la mer , qui insiste,
le long de la côte des corsaires , .
cinglent les visages,
comme pour les réduire au silence .
… mais pour l’instant ils résistent,
et masquent leur vie parallèle,
derrière le fard gris-vert des lichens
où ils semblent englués .
Leur attente est persévérance.
Ils restent
car ils sont attachés au sol,
probablement reliés de l’intérieur
par d’authentiques présages,
qui ne nous ont pas encore été donnés.
Ainsi les collines paisibles,
abritant dans leur creuset la forge du volcan,
paraissant éteint à jamais.
–
Nous sommes des témoins ( RC )
Nous sommes des témoins,
Pouvons témoigner de la réalité des choses,
L’écorce du pin est rêche, ses branches finissent en souplesse,
L’eau des torrents suit la pente dictée par les montagnes,
Les galets de granit, arrachés par les flots, ont la douceur polie de tes seins.
Le sable s’accumule dans les baies, mais peut aussi se dresser en nuage blond.
Le froid dicte son gel, rapidement contredit par les souffles tièdes du lendemain,
Et nous pouvons parcourir tout ça, essayer de franchir les abîmes, nous griffer aux ronces.
Cela nous est naturel, mais notre mémoire n’a que celle de notre ressenti,
Elle a oublié, depuis que se dévide le fil du temps, que la force motrice nous échappe,
– comme elle échappe à l’histoire…
Les roches sont sous nos pieds, engluées dans la terre,
mais leur origine dialogue avec le mystère des constellations et la caresse du soleil.
Nous sommes des témoins de » l’état des choses « ,
D’une explosion qui semble arrêtée, – l’alternance inlassable du jour et de la nuit semblant une évidence,
Une île parcourue d’éternités,
alors que nous sommes livrés à la nuit, –> à quelques dizaines de kilomètres de là.
RC – 2 septembre 2013