Textes poétiques et d'actualité -nulle part ailleurs !

inspiré d’art

Instants recousus – ( RC )

art - dessin de Rémi Bastier, alors élève de 6è de collège


Calme plat et mer vide – ( RC )

peinture -José Ibarrola horizon de lumière 1996

Sans doute as-tu quelques raisons
de contempler par temps limpide
l’étendue de l’horizon
où le calme plat n’offre de prise
qu’à une mer vide….

A un moment le muret s’interrompt
pour laisser voir les marches d’un escalier
descendant la falaise.

Ici le temps s’enlise
s’étire et va se prolonger
et même les vagues se taisent:

elles emportent l’esprit
dans un colloque sentimental
qui jamais ne s’affranchit
des horizontales.

Ici, tout est immobile et lisse:
on n’attendra pas de sitôt
le retour d’Ulysse
au-delà des eaux.

Il s’est absenté
bien trop longtemps,
mais tu l’attends patiemment
dans les couleurs bleutées
de la solitude

qui ne sont qu’un prélude
à la fin de l’été….


Fleurs de Jean-Gilles Badaire – ( RC )

peinture Jean-Gilles Badaire

Tant de cendre sur l’image,
de griffures , de ciels d’hiver,
tant de gerçures, de soleils noirs
et de gestes empâtés,
quelques fleurs desséchées
comme des cœurs arides
couronnés d’épines
depuis longtemps
vidés de leur sang,
nature tragique immobile

  • présence dans l’absence
    vie interrompue,
    nature morte qui crie
    de son silence
    dès qu’on s’approche
    de ses noirs et ses gris….


Rien ne me fera retourner en arrière – ( RC )

peinture Lucio Fontana: l’histoire du jour

Je marche contre le vent,
le sable me colle aux yeux,
tourbillonne et envahit de gris,
la couleur de la vie.
Ma toile s’obscurcit.
Pourtant je jouais la transparence,
et l’écume filait
sur la crète des vagues .

Je marche contre le temps,
mais rien ne me fera retourner en arrière,
on ne va que dans un seul sens,
sans pouvoir revenir
dans le paysage de naissance.
Je ne peux que taillader,
au hasard, la toile peinte aujourd’hui.

Elle s’égouttera, saignant de ses blessures,
et derrière, je ne verrai que
la porte de la nuit.

RC janv 23


La dispute – ( RC )

Chapiteau dit de « La Dispute » (XIe) – Musée Sainte-Croix, Poitiers (86)

Il était moins une :
un génie a figé dans la pierre
de la manière la plus opportune
nos héros à l’attitude guerrière :
chacun se tient par la barbichette:
aucun ne veut céder du terrain
on brandit une hachette,
enfin, tout ce qui tombe sous la main :

de petits personnages placés en arrière
apparaissent dans le décor
tentent de retenir les adversaires
c’est que le corps à corps
ne favorise pas la discussion
entre nos lutteurs,
c’est alors, au comble de l’émotion
que le sculpteur
pour éviter l’issue funeste
prend la décision
de suspendre leurs gestes

car dans l’abbatiale
le combat fatal
aurait été du plus mauvais effet:
figés comme des chiens d’arrêt…
on a dû placer tout en haut
ces petits bonshommes,
en équilibre sur une colonne
avec ce chapiteau
que l’on dit historié
d’une église de Poitiers…


Rien pourtant, ne demeure immobile – ( RC )

autoportrait- Rembrandt

Mes mains ne peuvent pas
changer le cours des choses.
Je ne sais vaincre le gel
de l’angoisse,
et le poids du ciel
m’écrase de son indifférence.
Je laisse passer les années,
ainsi le sable, qui file
entre mes doigts.

Même le miroir
ne me reconnaît pas.
Je change imperceptiblement,
sans identifier les différences :
peut-être que de l’extérieur,
j’arriverai à fixer un instant
un portrait trompeur
qui ressemble , juste à l’idée
que je m’en fais,

  • comme Rembrandt
    et ses auto-portraits,
    toujours davantage absorbé
    par les rides et les années
    qui défilent –
    dans le calme apparent,
    où rien pourtant,
    ne demeure immobile.

(inspiration : texte de P P Pasolini, qui suit )…


J’ai le calme d’un mort :
je regarde le lit qui attend
mes membres et le miroir
qui me reflète absorbé.
Je ne sais vaincre le gel
de l’angoisse, en pleurant,
comme autrefois, dans le cœur
de la terre et du ciel.
Je ne sais feindre ni calme
ni indifférence ou autres
exploits juvéniles
couronnes de myrte ou palmes.
Ô Dieu immobile que je hais
fais que jaillisse encore
vie de ma vie
peu m’importe comment.


Moondog à Manhattan – ( RC )

Afficher l’image source
Album du musicien compositeur « Moondog »

Pour celui qui s’est égaré dans la ville,
au pied des grands buildings,
se souvenir d’une entrevue
avec le grand viking
à l’angle de la 54è rue

( une possibilité entre mille :
il n’est jamais trop tard
pour assister au concert
en marge du progrès
):
passera un drakkar
oubliant le chant de la mer –

s’échoue sur les galets
après avoir dépassé
les temps historiques
qui n’ont plus cours
de l’autre côté de l’atlantique :

c’est le retour
du poète et musicien
surgi des heures antiques
,
mariant la lune et un chien
comme dans un tableau de Miro :

un vagabond compositeur
sans impresario
coiffé d’un casque à cornes.

Dédaignant les pop-corns ,
il a traversé sans saluer
les publicités,
la statue de la liberté,
à défaut de les voir .

Broadway et ses néons
dans sa flèche oblique ,
laisse sans opinion
notre héros, dont l’allure bizarre
n’est plus de mise.

Toi qui t’es égaré dans les boulevards
errant au hasard
à travers Manhattan

tu n’as pas oublié sa musique,
flottant dans l’air électrique
parmi les fast-food
répandant au-dessus du macadam
comme un peu de poudre
dans les matins gris…

Moondog semblant sorti
tout droit de la mythologie….


Le jardin bleu – ( RC )

peinture  H Matisse  :       deux filles  sur un fond  corail, jardin bleu         Collection Barnes

N’as  tu jamais   rêvé d’ un jardin,

qui s’éveillerait à la nuit ?

         ( et ses arbres  bleus,

        vaguement brossés

        dans un carré  suspendu…)

                        Ce serait une fenêtre

                       ouverte  sur un intérieur 

                       quand s’approche minuit ,

que nos  corps fatigués par la lecture ,

se dessinent avec peine       sur le fond corail.

         Les joncs,         dans leur  halo blanc

sont prêts à envahir tout l’espace libre:

        on se demande  ce qui les  retient,

si ce n’est  le vent ,

      qui retient  son souffle.

Il semble qu’une silhouette  indécise

s’approche  de la fenêtre,

toute vêtue         du bleu d’un ciel

qui a commencé à confondre l’air,

mangeant branches et feuillages .

           Rien ne pourra  s’opposer

                     à ce qu’elle  rentre,

lentement      – comme  dans  ces  films

                          où les nuages  

                     se glissent  sous les portes – ,

        à moins  que le  peintre

              ne remplace la nuit,

elle qui se déplace  sans  bruit ,

en accrochant au mur,

le calme d’un jardin de printemps .


La neige était bleue – ( RC )

détail de la grande anthropologie bleue ( hommage à Tennessee Williams ) / Yves Klein

Je suis repassé sur les traces
que j’ai laissées dans la neige,
je me souviens avoir glissé
et que la neige était bleue.

Ça donne envie de s’y rouler
pour en manger les grains;
de ne pas écouter ceux
qui n’en ont jamais tenu dans leurs mains .

Mes traces sont restées;
d’un bleu profond,
l’azur s’est décalqué
aussi sur mon front.

Le soleil s’est enfoncé
au-dedans des pentes,
celles des collines
en voiles transparentes.

Des arbres se sont tordus
dans la tourmente, et ils ont fondu .
La neige elle, est restée sur mes doigts,
bleue; mais je n’avais pas froid.


Des tours bien fragiles – ( RC )

peinture: Anselm Kiefer

Tu n’as pas su construire,
avec tes mots, une tour
assez solide pour atteindre,
ne serait-ce que
le plus bas des nuages.

Une échelle demeure
renversée dans les gravats.
C’est aussi que l’orgueil
n’a pas réussi à ouvrir
une seule fenêtre.

Jacob a pris ses rêves pour une réalité
mais les anges gardent leur domaine,
et ont repoussé l’échelle du pied,
détruit la tour,
il est vrai, bien fragile :

la terre promise empiète souvent
sur celle des autres,
et si on prend un dieu à témoin
pour tracer les frontières,
chacun peuple se réserve le droit
de construire des tours plus hautes encore:

l’orgueil suscite des vocations
toujours plus nombreuses,
mais appelées inexorablement
à retourner à la poussière.

Je m’arrête, maintenant,
sous un soleil au regard fixe.
Il sera toujours, hors de portée .


une soif d’encre – ( RC )

D’après  » le singe de l’encre » de J L Borgès. voir https://booknode.com/le_livre_des_etres_imaginaires_01398324/extraits

 

Year of the Monkey (猴年) | Patrick Siu Chinese Calligraphy ...

Quand je saisis le pinceau,
vient se poster derrière moi,
parfaitement immobile,
le singe au poil noir.

C’est un noir profond,
son poil est long et flexible,
ses yeux sont bruns,
pailletés de jaune.

Il attend que je prenne mon élan
et que je lance des arabesques
en traçant ces calligraphies
qui jouxtent les couleurs fragiles
des fleurs de printemps.

La feuille en est vibrante,
comme si déjà un vent frais
agitait branches et pétales.

Quand j’estime avoir fini,
le singe saute sur mon épaule,
puis sur la feuille,
où il boit l’encre, avant qu’elle ne sèche.

Maladresse ou malice,
il prend la peine
de tremper sa patte
dans l’encre de Chine,

La trace qu’il laisse est
comme une main humaine
mais miniature,
que l’on observe à chaque dessin.

Puis il revient s’asseoir
à côté du bureau,
et ne tarde pas à s’endormir,
le museau encore barbouillé d’encre.

On n’en voit pas la différence
avec l’obscur de son pelage.
C’est peut-être à force d’en boire
qu’il est devenu aussi noir.


Une distance que l’on porte en soi – ( RC )

Ce qu'il y a entre nous...

photo  Catherine Loth – musée des moulages  –  Lyon

 

Ce qu’il y a entre nous
est quelque chose d’indéfinissable.
        Je me reconnais en toi,
comme si c’était un miroir:
tes yeux me le rappellent…,
mais j’ai beau me rapprocher,
te toucher,
        Tu ne seras jamais moi,
et jamais je ne verrai par ton regard.

Peut-être que son éclat
est l’image de tes pensées,
qu’elles aussi je ne peux saisir.
          Je ne serai jamais toi,
et dans sa limite la plus ténue,
même chair contre chair,
il y a toujours
cette distance infranchissable,
que l’on porte en soi.


RC – juill 2018

 

 

voir  aussi,  sur une  autre photographie  de Catherine Loth, cet autre texte, créé le même jour…


Une toute petite armoire – ( RC )

art- Sophie Calle

 

C’est une armoire un peu bizarre ,
où se cachent plein d’histoires,
des souvenirs d’enfance,
de petits objets
que conservait ma mère
dans sa boîte de couture,
une boucle de cheveux blonds,
dans du papier de soie,
des bandes de papier
avec mon écriture tremblée
décrivant la grille du jardin,
les escargots qui se cachaient
sous le rebord du mur.

Comme on peut le deviner,
un secret reste un secret .
Il y en a de terribles
cadenassés à triple tour,
enfouis au fond de la mémoire,
qu’on s’efforce d’effacer,
mais qui reviennent
tôt ou tard,
à la surface.
Rassurez-vous
ce ne sont les miens .

Il y a , …. il y a
plein de choses encore,
tant qu’on pourrait s’étonner
que cela prenne place
dans cette petite armoire .
– Je ne ferai pas une liste :
– d’ailleurs à quoi bon ? –
elle n’a pas de fond,
car elle s’ouvre sur l’infini
et la course des étoiles .
Si vous l’ouvrez
( car je n’ai pas de clef )
vous n’y verrez rien
de particulier .

Je suis seul à savoir ce qu’il y a dedans…


RC – mai 2017


Constellations de Miró – ( RC )

Résultat de recherche d'images pour "Personnages dans la nuit guides par les traces phosphorescentes des escargots"

peinture: Joan Miró -Personnages dans la nuit guidés par les traces phosphorescentes des escargots (1940 )

 

J’ai suivi les étoiles,
et l’émerveillement d’un enfant
voyant dans le firmament,
les rêves reportés sur la toile,

les animaux du zodiaque
les femmes oiseaux,
peintes par Miró ,
un chant élégiaque

imprimé dans l’irréel :
Des figures bizarres,
un vocabulaire de chiffres épars,
majuscules et voyelles

où des personnages se bousculent
dans une curieuse constellation,
couleurs joyeuses en éruption :
des yeux, des triangles et des bulles

Il y a quelque chose des Shadocks
rien n’est rectiligne :
ici, on parle la langue des signes :
l’espace est ventriloque,

On peut sauter à l’aise
de planète en planète :
la nébuleuse est stupéfaite
et ouvre ses parenthèses

par l’intermédiaire d’une marelle,
où, dans un silence éternel,
il suffit d’une échelle
pour atteindre la case « ciel »…


RC – nov 2017

 

Image associée

Joan Miró:   Femmes au bord du lac à la surface irisée par le passage d’un cygne


Reines de France – Scarabées – ( RC )

Anselm Kiefer

sculpture –  Anselm Kiefer ( dans la suite de sa série  « les reines de France » )


Le quadrillage régulier des salles du palais
s’enlumine         de celui des fenêtres hautes.
           Le pied emprisonné sous la bottine
risque un déplacement prudent
sous le manteau noir
ceint d’hermine  .
          La robe de plomb
sertie d’opales et rubis,
ne protège pas du froid .

Cuirassée  d’ élytres.

Il faut déplacer
         cette pesanteur rigide
sur le carrelage muet
à la façon d’un automate
bien que le corps
         ambitionne
l’audace du soleil
ses rayons enveloppant
ta  blanche jambe de rousse .

Un bourdon dans sa cage.

( On ne court pas ,        légère
dans les allées du parc
          en habits de coton
après avoir laissé
au vestiaire
         l’habit d’apparat ) .
Le protocole impose
le maintien,       la tête haute .
Les gardes sont en armure.

Scarabées.

Le domaine est clos
les arbres étendent leurs ombres,
bouchent l’horizon,
            les murailles hautes .
On n’attend plus le prince charmant .
Une chambre étroite dans la tour nord,
            un sombre plafond à caissons .
Une lourde bible pèse sur la tête .
On ne la voit plus .

On a trouvé un insecte  séché  dans une  boîte  d’allumettes .


RC – sept 2016


Une naissance en peinture – ( RC )

Diebenkorn Coffee

                             peinture:  Richard Diebenkorn

Vêtue d’inachevé,
ce n’est pas ton visage
qui émerge de l’eau,
et ton rire blessant la toile .
Ta peau est fluide,
et personne n’écope,
les éclaboussures
étoilant ta robe .

Tu émerges juste de la couleur :
Il suffirait de presque rien,
pour que tu retournes
dans l’anonymat
….      – te diluant dans les glacis,
      et les coulures ,
dissimulée par les larmes,
de la peinture:

Celle-ci n’est pas sèche ,
et colle encore aux doigts.
Il y a, sur eux
comme une saveur marine…
teintée d’essences :
C’est une apparition :
–       sous les pinceaux,
         j’assiste à ta naissance .

RC – avr 2016


Porté sur la face claire des nuits – ( RC )

Peinture: Odilon Redon

Pastel   : Odilon Redon

 

Je revois  sur une  toile  , ce visage
Le regard  lointain, comme  détaché  du monde,
Essayant derrière  moi, de déchiffrer les ombres,
Les équilibres  instables  du vent, et la face ignorée des jours…

Ou peut-être simplement,
Un regard qui ne voit pas,
Mais qui en est , à reconstruire,
L’écheveau des rêves :
L’ailleurs porté sur la face claire des nuits,
Où on traverse des instants
Si loin ,   du poids  du corps ,

Qu’on pourrait apercevoir
Au milieu de la lumière noire,
Des éclats  de couleur ,
Engendrés par les effluves d’une terre
Qui se repose de la fatigue du jour,
Et laisse une mémoire ,
Libérée de son carcan .

C’est un envol vers d’autres  contrées ;
Les explorer se fait sans peine .
Il n’y a pas de limites,
Et aucune frontière ne la retient prisonnière.


I see on a canvas, this face
The distant look, as detached from the world,
Behind me ,trying to decipher shadows
The unstable condition of the wind, and the ignored face of the days …

Or maybe just,
A look that does not see,
But who is to rebuild,
The web of dreams:
Other places focused on the face of clear nights,
Where we cross moments
So far, of the body weight,

We could see
Amid the black light,
Color bursts,
Caused by the smell of an earth
That sits of the tiredness of the day,
And let a memory,
Freed from its shackles.

It is a flight to other countries;
Explore them ,is done easily.
There are no limits,
And no border holds it prisoner.


Le dessin blanc – texte 2 – Cheval du Wiltshire – ( RC )

Art préhistorique – âge du bronze :           cheval de Cherhill ( Wiltshire, England)

Le dos  tourné  au miroir,
les images  se reconstituent,

Au détour une vallée;
Le train s’obstine,

sur  sa voie  étroite,     à voguer
au sein de paysages paisibles .

L’éprouvante chape  des nuées  ,
se pose toujours
 
sur les collines du Wiltshire .

Sa sombre autorité,
cède parfois au tracé blanc,
>     une découpe  de craie,

Où un cheval s’est posé,
étourdi  du destin  :

La marque imprimée des hommes
Garde le mystère intact,

d’une chose plus ancienne,
que le passage du temps.

s’il fallait suivre les crètes
Observées du ciel,
Comme  le font les oiseaux,

Ce serait le défilé des siècles,
inscrit  dans le mouvement,
Toujours suspendu

Des grands chevaux blancs…

Le train, lui,         vite disparu,
comme s’il n’avait jamais existé.

RC- mars 2015


« Vois-tu », Cécile ?

Illustration d’un article de Antonello Anedda, visible sur  « terres de femmes »

 

 » Vois-tu »,  Cécile,

Ce sont les yeux  d’une  autre,
Dont la vue  s’immisce….
Mais  n’atteint pas  l’iris

– D’une distribution réussie,
Tu partages avec Lucie…
La légende et le martyre

Comme se transmettent les dires  .

Si, même en pleine lumière
Des dieux dont tu parles,
Nous ne voyons que pierres,

Au toucher, et selon toute nécessité

Nourris ta vue,   de tes caresses,
Certains disent  qu’elle baisse
Mais      l’éclat de la sagesse

Remporte le combat, et se nourrit de cécité….

Il n’y a plus de place,
Sur la Sainte Figure…
L’absence  d’expression, sur ce visage pur

Jamais, ne laisse de trace .

Creuses, les orbites
Vides de leur vue…
Pour celle, sans limite

Empruntant un chemin imprévu…

Un court-circuit des sens,
Dans l’assise du jour.
Le supplice de la nuit,

Au fond de la tête,  s’élance.

Les yeux  sont livrés  sur un plateau.
Celui-ci est d’étain,
Leur  trajectoire nous étreint ,

Dépourvus de cils…

Vois-tu bien,   Cécile,
Sur le plat de  métal,       ces îles  ?
Le sang  remplit la coupe…

( Incision et découpe )

Il n’est pas trop tard,
Pour laisser vivre      ce regard  :

Aucun bandeau          ne dissimule
le visage  anonyme.

Les portes fermées à la lumière,
Empruntent les chemins d’un désert.

Ce sont  des oeillères,
Allant par paires.

La vue, malgré l’absence,
S’invite en voyance,…
C’est peut-être une chance

De voir  sans les yeux.

Sur la face,       seulement des creux,
Enfoncent la surface,
Les as-tu eus seulement, un jour,      bleus ?

>     Puisque  tu franchis les ciels,

Comme autant de paupières,
Ouvertes à la lumière
Et son aveuglement de mille feux…

La ferveur supplante la couleur,

Malgré la douleur,     tu ne vois,
Qu’avec les doigts
Et le trajet du coeur…

—  Désormais, aucun obscur
N’efface du réel
Sa distance immatérielle.

L’infini        se traverse comme le futur.

RC – sept 2014

 

Peinture:      F de Zurbaràn:  détail de  « Sainte Lucie »

 

 

 


Cavalleria Eroica – ( RC )

sculpture:  Arman  Cavalleria Eroica   2004

sculpture:  Arman                 Cavalleria Eroica 2004

C’est une bataille de grand renom,
Des hommes, contre des canons,

La Grande ou la première,
Aux avancées meurtrières…

Se rue ,            grande cavalcade
Bientôt en dégringolade,

Comme se mène,   la charge furieuse,
Devant de froides mitrailleuses

Et voila notre escadron fauché
…A terre          la grande chevauchée

Dans les branches, les chairs éclatées,
Plantes nourries de membres étalés,

Découpés en lanières,
Boue sanglante, de guerre aventurière,

Jusque aux lèvres des tranchées,
D’une soif de sang jamais épanchée…

C’est une peinture d’histoire, ce tableau,
Sombre,                   aux accents de Waterloo.

RC  – février 2014


Masque – ( RC )

masque  Baoulé de     Côte d’Ivoire

La magie du masque,
Ne dit rien que son visage noir,
Le bois creusé, que l’on dirait
Moulé sur un corps,

Un abri, derrière lequel
Il se réfugie,           –
–    … Je suis en compagnie,
D’un esprit.

L’ombre d’une face,
L’épreuve du silence,
Laissant sa trace,
Au-delà des gestes  ;

Ceux de la danse,
Le lien vers un peut-être,
Sévère et magnifique,
De traduction magique

C’est une patine offerte,
Repoussant la lumière,
Happée vers l’intérieur,
Vers des mots d’une autre langue

Et qu’on protège  des regards,
Du commun des humains.
Les lignes de ses formes fondent sa force,
Son action saluée , bénéfique,

Quand le masque  est de sortie,
Chassant en conviction,
Les mauvais esprits,
Les mauvaises récoltes

Viens demain,
Sans lui, en habit de paille,
Remise-le dans l’ombre,
Les yeux fermés

La bouche ouverte,  …
Le masque sacré
Veille même sur la nuit
Et aussi notre destin.

RC – décembre 2013

masque africain- Afrique centrale

masque africain- Afrique centrale


Grâce à mon collage – ( RC )

montage -collage perso  Lyon 2011

montage -collage perso   à partir de photos perso               – fête des lumières            Lyon 2011    ( fontaine  d’Amphitrite )

Je contemple,

Un ours, enroulé en boule,

Avec du papier journal,

Trempé d’encre rose,

…  La statue dans le parc,

Regarde ailleurs,

Il est midi quelque part,

Sur les îles,

De l’autre côté du monde,

Le sable est blond,

Le soleil est découpé,

Et déposé à mes pieds,

La trompe d’un éléphant

Dépasse parmi les nuages,

Le temps est suspendu,

Chaviré dans la couleur,

Immobile et sans âge,

Grâce à mon collage.

RC  – décembre  2013


Au commencement est le geste, à la fin, la douleur ( RC )

Sculpture  Michel-Ange - Pièta  1498

Sculpture Michel-Ange – Pièta 1498

Il y a toujours un commencement, mais nous n’en avons plus mémoire,

Ou c’est celle, animale, de l’embryon que nous fûmes…

Aussi on nous dit la Genèse, le premier jour, la lumière, ( les contes fleuris de la création du monde ),

 ornent les missels, ou occupent les cadres dorés des musées.

 

…Le geste se prolonge à travers tous les corps      ( Bernard  Noël ),

,       et c’est de l’espèce commune,       oui,          de cerner, attentif à notre fonds commun.

 

Le sang circule donc dans les veines, et l’existence tutoie différences et préjugés,

C’est l’intérieur qui parle, ( le flux sanguin, se trouvant de la même couleur chez tout le monde)

Le geste est originel… Pêchant dans l’inconscient collectif.

Il se traduit en images,  parfois elles nous envahissent, car construites à notre semblance…

La Vierge est à ma portée, portant dans ses bras son fils mort, et affaissé.

Son immobilité et sa blancheur ,           sa dureté de marbre, quelle que soit l’habileté de l’artiste,                    lui ôtent sa chaleur.

Juchée sur son piédestal, et faussement accessible, le monde ne recommence pas avec elle,

au contraire, elle se substitue en mythe, aux mères des pays de famine, où toute mère, hurle à la vie enfuie, et qui s’est, au sens propre, arrachée d’elle.

S’il y a une genèse, il y a aussi celle de la douleur…. Il est des Pièta vivantes, ne prêchant pour aucune religion.

RC – 14 octobre  2013

Pogordski

Parodie de Pièta: ( une  de la série photographique  de G PODGORSKY )


Les têtes jaunes – ( RC )

peinture : V Van Gogh

–            peinture : V Van Gogh

Toutes ces têtes jaunes,
Qui ensoleillent,
Les collines,
Et se tournent, ensemble,
Couronnées de leur soleil pétales,
Ondulent ensemble,
Et jettent leurs feux ,
De couleur, sur les champs
Sous la houle de la saison  ;


Et si celle-ci s’avance,
Quel que soit le vent,
Les têtes grainées,
Devenues lourdes,
De tant d’heures de chaleur,
Se plient, et regardent le sol,
Et finissent par se rendre,
Ainsi, dans le vase de Van Gogh,
Les tournesols.

RC – 1er décembre 2013

peinture  Van Gogh

peinture :  Van Gogh